La médecine traditionnelle est-elle légalisée par la législation haïtienne?
Avec l'introduction officielle du nouveau Coronavirus en Haïti. Il y a un vent de panique qui a soufflé sur le territoire national. Non seulement par rapport à l'étrangeté du virus, ses lourdes victimes dans bien d'autres pays mêmes les mieux équipés, et ce en dépit de l'importance accordée au secteur sanitaire, du budget alloué à ce dernier et du respect scrupuleux pour le serment d'Hippocrate. Il y a lieu aussi de mentionner la vitesse vertigineuse avec laquelle le virus frappait et tuait d'innombrables gens. Mêmes les scientifiques qui devraient apporter une réponse proportionnelle à la pandémie, se montraient dépassés par les événements. D'où les médecins ont dû recourir à une sorte de traitement symptomatique en attendant un moyen rationnel pouvant éradiquer le virus.
Face à une telle situation, un vieux débat allait rebondir dans le secteur sanitaire et dans les médias: Pourquoi ne pas recourir à la médecine traditionnelle? Le Président malgache Andry Rajoelina n'a pas pris trop de temps pour sortir de son mutisme, en clamant haut et fort lors d'une conférence de presse qu'ils ont trouvé un traitement contre la Covid-19, ce dernier porte le nom de Covid Organics et est à base de plantes naturelles. C'est alors que les médecins traditionnels, les naturopathes et les phytothérapeutes haïtiens profitent pour monter au créneau en réclamant un retour à l'usage modéré des plantes naturelles mais aussi une reconnaissance par l'État de la médecine traditionnelle et son intégration dans le système sanitaire.
En réalité, il n'y a pas que les praticiens qui ont un tel vœu. De plus en plus de voix s'élèvent pour défendre une telle cause, à côté de certains étudiants au sein de l'UEH, à côté de certains professeurs d'université tel que le professeur d'Anthropologie Jean Yves Blot, c'est le tour de l'actuel Recteur de l'Université d'État d'Haïti (UEH) Fritz Deshommes qui avait abondé dans le même sens, alors qu'il était Vice-recteur à la recherche à cette époque, lors d'un symposium sur la médecine traditionnelle haïtienne sous l'initiative du Ministère de la Santé Publique et de la Population (MSPP). Selon lui, dans les pays en voie de développement, en Amérique latine, en Asie, en Afrique elle est la plus accessible et la plus abordable, par ce qu'elle est beaucoup plus disponible, inspire beaucoup plus de confiance et est beaucoup moins chère, en moyenne, elle coûte 10 fois moins chère que la médecine conventionnelle. En Inde, elle est la seule source de soin sanitaire disponible. Beaucoup de patients aux USA, en Finlande, au Canada s'y réfèrent. Ses avantages sont les suivants:
- éviter les effets nocifs des médicaments conventionnels.
- fait montre d'un potentiel curatif plus élevé dans le traitement des maladies débilitantes.
- est plus souple, diverse avec un caractère holistique.
Aux États-Unis d'Amérique, 40% des patients l'utilisent régulièrement. Et 78% des patients atteints du VIH sida en font un usage systématique. Le Recteur a terminé son intervention en faisant les recommandations qui suivent:
1- Assumer et prendre en charge notre médecine traditionnelle.
2- Reconnaître son apport inestimable à la production et à la préservation de la santé.
3- Comptabiliser parmi nos richesses ces plantes et herbes.
4- Recourir à ces savoirs, pratiques, techniques, croyances et méthodes pouvant diagnostiquer, prévenir et guérir les maladies physiques et mentales.
En 2003, il y a une enquête qui a été menée et qui a révélé qu'à Verrettes, il y avait 5 infirmières pour 1000 habitants, 2.2 médecins et 86,4 guérisseurs. Du côté de la Chapelle, une autre Commune du Département de l'Artibonite, il y avait 0 infirmière pour une population de 10 000 habitants, 0,4 Médecins et 124.3 guérisseurs.
Compte-tenu de ces différentes approches, la nécessité se fait vivement sentir pour que la législation haïtienne puisse prendre en compte notre médecine traditionnelle, qui selon toutes les statistiques reste la plus répandue et la plus accessible, tout en travaillant à démocratiser, moderniser et dépersonnaliser ces types de savoirs au profit de la nation haïtienne et particulièrement les plus démunis, les petites bourses qui ne peuvent se payer le luxe de se faire soigner à un centre hospitalier même si ça devrait être leur droit le plus entier.
Rédaction: Alain THERZIER,
REZO KRETYEN BENI || RKB
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